Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Un peu, passionnement, à la folie
Un peu, passionnement, à la folie
Un peu, passionnement, à la folie
Derniers commentaires
18 juillet 2008

Lu sur le site de Libération, partie "le contre-journal"

Les «mauvaises mœurs» du prof manifestant

Il risquerait de « corrompre son milieu professionnel », selon le rectorat. Rodolphe, enseignant stagiaire, est suspendu de son poste à l’Education nationale depuis sa mise en cause par des policiers lors d’une manifestation, début avril, à Paris. Accusé de « violence à agents », il doit comparaitre, fin septembre, devant le tribunal correctionnel.

Rodolphe. « Je suis enseignant stagiaire en mathématiques et physique-chimie au lycée Denis Papin à la Courneuve. J'aurais dû être affecté à un poste de titulaire à la rentrée, mais je suis poursuivi pour violence à agents depuis ma participation à l'une des manifestations lycéennes contre les suppressions de postes à Paris, en tant qu'encadrant, le 3 avril. J’ai été interpellé, placé en garde à vue et renvoyé devant le tribunal en comparution immédiate. L’audience a finalement été reportée en septembre, mais le rectorat a suspendu ma titularisation.

Beaucoup de policiers étaient présents et rythmaient la marche, imposant arrêts et accélérations. A la fin du défilé, près du métro Saint François Xavier, les lycéens se sont rassemblés dans le calme, la plupart s’était assis par terre. J’ai alors vu certains policiers enlever leurs brassards, puis se mêler à la foule. Lorsqu'ils se sont rapprochés d'un groupe de lycéens, je les ai suivis. Une dizaine de jeunes s’étaient fait interpeller, de façon assez violente, pendant le défilé. Constatant ma présence, les policiers m'ont demandé de m'éloigner, mais j’ai insisté pour rester, en leur expliquant que la manifestation était autorisée. L'échange a duré deux ou trois minutes, puis ils m'ont interpellé.

Je pensais subir un simple contrôle d'identité. J’ai tout d'abord été fouillé, derrière le camion. Voyant des marqueurs dans mon sac, l'un des policiers m'a lancé « t'es un taggueur ». Je me suis présenté comme professeur. Mais l’un d’eux a déclaré à son collègue : « Tu l'as bien vu jeter des cailloux, hein ? » « Ouais, ouais, je l'ai vu » a répondu le deuxième agent. J'ai contesté l’accusation, mais ils l’ont répétée à leur responsable. J'ai alors été placé en garde à vue pendant 24 heures, accusé de violence à agents. J'ai été déféré le lendemain matin au Tribunal de grande instance, pour une comparution immédiate. Entre temps, deux des trois policiers qui m'avaient accusé s'étaient désistés. Le procès, qui devait se tenir le 17 avril, a été reporté en l’absence du policier, au 24 septembre.

L'histoire dépasse le cadre judiciaire puisqu'aujourd'hui, ma titularisation est menacée. Le 18 juin, j’ai reçu une lettre m'informant de ma suspension pour quatre mois, en attendant l'issue du procès. Une « mesure conservatoire » car je risquerais de « corrompre mon milieu professionnel », alors que je suis en vacances ! Le 4 juillet, j'ai appris que ma titularisation ne passerait pas devant la commission et serait rediscutée à une date ultérieure au procès.

La titularisation se base sur plusieurs critères. Par exemple, le critère pédagogique dépend de l'appréciation de l'enseignant titulaire et celle du formateur IUFM. Le dossier est ensuite présenté au recteur, qui doit le valider.
En consultant mon dossier administratif, j'ai découvert que le recteur avait envoyé un courrier au Tribunal de grande instance de Créteil, pour s'informer de ma situation. Je l'avais averti immédiatement. Comme je n’ai pas été suspendu immédiatement, j’ai perdu les possibilités légales de recours. On aurait affirmé à mon sujet au rectorat que le recteur ne pouvait « pas prendre le risque de garder quelqu'un qui aurait de  mauvaises mœurs ». Une expression syndicale peut-elle être rangée dans la catégorie « mauvaises mœurs » ?

Je suis donc suspendu jusqu'au 18 octobre. La suite dépendra de la décision du tribunal. Les policiers n’ont pas de preuves contre moi. Mon avocat se dit confiant. L'incertitude réside dans la réaction du recteur, si je ne suis pas innocenté. Le poste auquel je devais être affecté à partir de septembre sera confié à des enseignants contractuels, qui se partageront mon planning. Je ne pourrais récupérer mon poste entier qu'en décembre. La rentrée 2008 ne se fera donc pas dans les meilleures conditions, ni pour moi ni pour mes futurs élèves. Quand à mon statut, je resterai stagiaire jusqu'à cette date et un arrêté rétroactif sera signé pour que je sois considéré comme titulaire. Mes formateurs me soutiennent, mon proviseur s'engage à être témoin au procès. Alors que mon avenir était assuré, il devient précaire. »

Réalisé par Laura Roland

Publicité
Commentaires
F
C'est ahurissant...<br /> Merci de relayer ce genre d'informations.<br /> Bises et bonne fin de journée.
Publicité
Archives
Publicité